Tu risques de te faire pincer très fort!

19 avril 2011

1987 voit la naissance d’Ellen Page, actrice canadienne dont la moue fadasse arborée dans Inception qui l’est tout autant vous fera préférer son ingénuité perverse dans Hard Candy, l’un des meilleurs films de la décennie écoulée. Il est à noter que Jena Lee, chanteuse emo’nb (WTF ?), est née la même année, ce qui me fait penser que rétrospectivement, certaines personnes auraient dû en profiter pour faire valoir ce droit formidable qu’est l’interruption volontaire de grossesse.

1987 c’est également l’année de la création de « Piss Christ », une photographie de 59,7×40,6 de l’artiste américain Andres Serrano représentant un crucifix baignant dans un récipient rempli de l’urine de l’artiste, et exposée deux ans plus tard au Southeastern Center for Contemporary Art de Winston-Salem, en Caroline du Nord.

Inutile de préciser que lors de sa présentation au public, elle suscita l’indignation de divers groupes religieux, ainsi que de certains sénateurs parce que l’artiste avait profité des subventions du National Endowment for the Arts, une agence fédérale chargée d’aider les institutions culturelles et les artistes américains.

Qui est Andres Serrano ?

Un photographe américain, donc, d’origine sud-américaine et célèbre pour son travail sur le corps, la mort, ou encore la religion.

La religion, catholique en l’occurrence, dans laquelle il fut baigné durant toute son enfance et qui influence plus ou moins généralement ses œuvres.

La série la plus connue et certainement la plus saisissante étant The Morgue, des clichés de détails de corps mutilés, brulés, livides, se référant clairement au romantisme morbide du XIX° siècle et sa fascination pour la mort, ainsi qu’à mon sens à certains détails de tableaux espagnols de la même époque.

Intéressant, ce Serrano. Et brillant.

Magnétisé par la culture religieuse que lui a inculquée sa famille afro-cubaine, Andres se définit comme un artiste chrétien, et à ce titre s’autorise à explorer, exploiter, triturer ce thème aux possibilités infinies, évoquant d’ailleurs la présence d’œuvres sacrées de la Renaissance dans son logis new-yorkais.

Depuis quelque jours, de virulentes manifestations avaient lieu dans les entourages géographiques immédiats de la galerie Yvon Lambert, petit musée privé d’art contemporain à Avignon, Vaucluse, France.

Pour les dix ans de sa collection est organisée l’exposition « Je crois aux miracles », qui reprend par exemple plusieurs œuvres d’Andres Serrano comme la série The Church, et bien entendu le dorénavant célèbre Piss Christ.

Ces manifestations ont connu leur point d’orgue lorsque dimanche 17 Avril, un groupe de militants catholiques (très) conservateurs se sont introduit dans le petit musée après nombre insultes racistes à l’encontre du personnel, pour aller briser la gangue de plexiglas qui entourait l’œuvre à l’aide de marteaux qu’ils avaient dissimulés sous leurs habits. Notons au passage que la deuxième photo ayant subi dégradations est une inoffensive figuration d’une nonne priant dans une église parisienne.

Ces actes de vandalisme pur et simple font suite à toute une série de protestations individuelles plus ou moins fédérées, ainsi que celles de l’épiscopat catholique qui demandait le retrait de la photographie incriminée.

Les manifestations étaient, entre autres, organisées par l’institut Civitas, mouvement dont la motivation principale est la « restauration de la royauté sociale de notre Seigneur Jésus-Christ » (sic). Un petit tour sur leur site internet à la sobriété eucharistique donnera au lecteur un aperçu des préoccupations fondamentales de ce groupuscule dont les affinités avec certaines mouvances politiques, officielles ou non, me laissent songeur. Voire pantois. Voir un peu énervé quand même.

Enervé parce que la raison principalement évoquée par le susnommé institut (lol) et son petit réseau de réactionnaires obtus est la christianophobie ambiante, qui représenterait une menace de plus en plus grandissante dans notre si beau et si pieux pays.

Les catholiques peuvent avoir toutes les raisons du monde à être choqués par Piss Christ.

L’art est une émanation de l’âme humaine qui n’a pour but que d’interroger cette dernière, et une absence manifeste de culture artistique a empêché ces assaillants ridicules d’envisager la photo honnie dans l’ensemble de la série qui y était présentée. Et qui a pour particularité, effectivement, de proposer une vision toute personnelle non pas de la religion en elle-même, sinon de la religiosité.

Comme Serrano le rappelle judicieusement dans une interviewe donnée à Libération ce mardi 19 Avril, ce n’est pas à l’artiste d’expliquer son œuvre, sinon elle n’est plus art mais propagande.

Ces exaltés ne se sont d’ailleurs même pas posé la question de savoir si l’artiste ne pouvait pas être de leur côté. Si, comme ils le prétendent, la chrétienté est aujourd’hui menacée par toutes sortes de comminations plus ou moins réelles, Piss Christ ne représenterait-il pas le traitement infligé au Christ, dans ce 21° siècle balbutiant et particulièrement dénué de toute spiritualité ?

Ce n’est bien sûr qu’une piste, mais il m’apparaît que la crétinerie de certains individus se prétendant défenseurs d’une cause, qu’elle soit religieuse, politique, philosophique ou que sais-je, devraient s’attaquer à leur cible en connaissance de cause, et au moins en employant les mêmes référents et les mêmes outils que les horribles artistes blasphémateurs qu’ils prétendent combattre.

Je me fous de la religion, qu’on veuille porter le voile, marcher sur des braises ardentes, monter un chemin de croix sur les genoux ou se faire couper le bout de la bite au nom de ses croyances.

Mais j’aimerais bien que chacun reste à sa place et utilise le dialogue et l’écoute pour faire valoir son point de vue, expliquer son opposition, ou bien, à l’extrême, saisir les autorités compétentes dans ce genre de conflit. C’est ce qu’on appelle vivre ensemble, dans un pays libre où chacun peut exprimer ses idées et faire valoir ses droits.

Mais bon, je dois certainement croire en Dieu.

D’autant que je n’arrive pas à m’enlever de la tête que cet évènement est le fruit pourri issu de nombre précédentes gesticulations politico-opportunistes de notre gouvernement, celui d’en France.

Il est à noter que dans les années 80, les polémiques américaines autour de Piss Christ sont retombées peu de temps après comme un soufflé. Auparavant montrées en France, comme à Beaubourg et déjà à Avignon dans la même galerie, ces séries n’avaient pas provoqué le moindre remous. Quelques groupes de têtes rasées en avaient vandalisé à Lindl, en Suède, en 2007.

Mais en France ces débats pénibles et inopportuns sur la laïcité ou l’identité et les sorties délirantes de tout un tas de représentants officiels n’ont eu pour effet volontaire que de mettre les composantes de notre nation dos à dos, y installant sciemment un environnement de violence larvée.

C’est pourquoi il n’est vraiment pas étonnant que dans les espaces vides ainsi créés s’y engouffrent toutes sortes de mouvances malfaisantes pour hurler au loup et à la décrépitude de notre beau pays dont l’ennemi intime seraient , entre autres, l’Islam et ses démons, renvoyant en pleine face cette de cette 5° république moribonde l’image de son propre échec, et dont la seule réaction est une fuite en avant toujours plus rapide et toujours plus dramatique qui me fait parfois penser que ce pays que j’adore est irrécupérable.

Sinon, écouter Mit me paraît être une très bonne idée.

Je me souviens.

21 octobre 2010

Blog! Ô doux blog de merde que personne ne lit!

Comme tu m’as manqué… Cependant, je crois que tu l’as joué fine, personne n’avait remarqué ton absence.

Une amie géographiquement proche de ma chambre à coucher m’a judicieusement rappelé l’existence de cet endroit où je puis aisément déverser ma haine de Nadine Morano sans qu’on puisse me dire quoique ce soit puisque jusqu’à preuve du contraire on est dans un pays libre et que je n’ai jamais insulté le physique d’aucun membre de sa famille, alors merde.

Cependant, il est à noter que sa copine Christine Lagarde est bien la seule de nos responsables politiques à avoir émis quelques réserves concernant les propos d’un parfumeur sénile sur un journal télévisé de la seconde chaîne publique.

(Oui, Nadine Morano est bien elle aussi une responsable politique, étant secrétaire d’Etat à la famille)

Passons. Puisque les affaires internes de notre pays sont dévolues à un gros cul mi-chauve mi-rubicond déjà condamné pour injures raciales (je ne vous mets pas de lien, vous aurez tout le loisir de découvrir les aventures de Brice en vous débrouillant par vous-même), il n’en fallait pas moins attendre du reste de l’équipe formidable qui nous gouverne. Comme celle qui ne le fait pas, d’ailleurs, ma Martine, là, tu marques pas beaucoup de points.

Qui s’en est réellement ému? Elise Lucet a (malgré tout) réagit bien tard en s’excusant de son absence de réaction immédiate. Le CAS, encore heureux, qui a aussitôt assigné à France 2 une mise en demeure? Jean-Paul a lui même adressé un communiqué un peu partout en précisant bien que ses tristes paroles “ne reflétaient en aucun cas [sa] pensée profonde”. Jean-Jean, je m’interroge. Quelle pensée profonde qui est tienne fallait-il donc percevoir dans cette saillie?

Audrey Pulvar, dans un billet diffusé dans son émission matinale de France Info, a eu l’intelligence de répondre par quelques paroles d’Aimée Césaire, le chantre de la négritude, un poète aux textes magnifiques beaucoup trop méconnu dans nos contrées métropolitaines.

D’aucuns considèrent qu’il faut boycotter les produits Guerlain, ce qui serait parfaitement idiot puisque J-P n’a plus rien à voir avec l’entreprise qui porte son nom depuis au moins 2002. Ca serait comme boycotter les crèpes parce que Jean-Marie Le Pen est de la Trinité-Sur-Mer dans le Morbihan. Ou bien boycotter les Volkswagen à cause de Hitler. Ou bien la moitié de nos objets de consommation à cause des Chinois qui tabassent les dissidents.

Affaire soldée, JP et Elise se sont excusé, le CSA a fait son boulot, et quand Audrey parle de crachat à la face des Noirs, ce n’est pas exagéré.

A défaut de renvoyer son glaviot au vieux claquos, ce sont des sacs plastiques de merde qu’il faudrait balancer à la gueule d’Hortefeux, Besson, Guéant et consorts. Parce qu’avec leur débat fétide sur l’identité nationale, le retour de bâton sécuritaire et le cynisme incommensurablement hypocrite du renvoi des Roms en Europe de l’Est, un ton qui commençait à se débrider dans la bouche d’une certaine catégorie de notre population s’est complètement libéré, et l’on peut dorénavant user de ce délicat phonème de “nègre” à la télévision nationale sans que personne ne vienne nous emmerder. A suivre: Gérard Depardieu viendra nous parler des bougnoules qui triment dans ses champs de vigne, et Mireille Dumas s’entretiendra avec Jean-Luc Godard sur ces sales radins de juifs, pourquoi radins? Ben pour rien, juste comme ça, c’est gratos.

Une application idiote sur Facebook “Which country are you” m’a fait découvrir que j’étais la France. L’une de mes amies a commenté cette action sur le ton de la blague en disant que dorénavant elle m’appellerait Jean-Marie. Ce n’est qu’une application débile. Mais faites le tour de vos amis, oui, ceux qui fument un gros joint dans votre salon en buvant des bières, pas ceux dont vous voyez la photo sur votre écran d’ordinateur en vous demandant à chaque fois d’où-est-ce qu’il peut bien sortir ce gros lard. Demandez-leur tout simplement, “est-ce que tu kiffes d’être français?”. Même pas besoin de leur demander s’ils sont fiers, ou heureux, ou whatever. Juste s’ils kiffent. Un débat sera ouvert. Au pire, on vous dira que non c’est la honte de toutes manières je compte me tirer en Belgique parce que là-bas au moins les clopes sont moins chères. Ou bien ouais, y’a moyen, à l’étranger c’est une plus-value pour pouvoir chopper.

Moi je suis bien content d’être français. je suis une sorte de gâteau au yaourt en-dedans de mes gènes, le bon compromis étant inscrit sur ma carte nationale d’identité.

Mais maintenant je suis plus très sûr.

Poste scrimtome: .

Je fais ce que je veux. Avec mes cheveux.

30 avril 2010

Il y a quelques jours, après d’insolentes après-midi de désœuvrement, j’ai décidé de revenir flâner sur les douces rives de ce blog approximatif qui fait la joie de mes amis cybernétiques insomniaques. Et quelle ne fût pas ma surprise lorsque, dans les tréfonds de la boîte mail associée, j’aperçus cette étrange missive que vous pourrez lire dans quelques instants. En effet, il apparaît que certaines personnes, alertées par mon esprit vif et ma verve truculente, aient eu envie de me demander conseil. Voici ce que je pus lire, non sans un sentiment de fierté mâtinée de circonspection:

Cher Brad.

Je voudrais me débarrasser d’un arabe, mais je ne sais pas comment faire. En plus, il réussit à se taper plus de meuffes que moi, et en plus en même temps. Crois-tu que je puisse le déchoir de sa nationalité française? Dans le cas contraire, quelles sont mes options?  Merci de me répondre rapidement, car sinon je vais me faire gronder par ma hiérarchie.

Brice H. , Clermont-Ferrand.

Tout d’abord, gentil Brice, permets-moi de te dire que j’ai bien le droit de prendre tout mon temps pour te répondre, parce que j’ai pas non plus que ça à foutre. En plus, j’ai envie de te répondre clairement: à quoi bon?

A quoi bon, puisque je sais que tu fais référence à ce charmant Liès Hebbadj, connu pour être l’heureux propriétaire d’une tringle à rideau doté de la capacité de conduire une voiture, ce qui n’est pas évident. Si l’on s’intéresse d’un peu plus près à M. Hebbadj, on se rend compte qu’il est français car il a épousé une française. Jusque là, rien de bien problématique, puisque beaucoup d’étrangers se marient avec des ressortissants d’en-dedans de notre beau pays, certains pour les papiers, d’autres par amour mais, que veux-tu, les gens sont parfois stupides. De plus, il fait partie d’une mouvance islamiste née au Pakistan qui prône l’application d’un Islam très littéraire. Autant dire plus ou moins arriéré. Cette mouvance n’a pas vraiment prise en France, tout du moins concerne-t-elle une minorité d’imbéciles que les autres musulmans d’en France considèrent également comme des imbéciles. Ce sont d’ailleurs souvent les gens comme Liès qui décident de grillager leur femme, malgré ce qu’elles peuvent en dire.

Alors j’ai envie de te demander, pourquoi? Pourquoi t’acharner sur ce garçon stéréotypé alors qu’il n’attend que ça pour bien se faire sa pub, et qu’en vérité tout ce qu’il mérite n’est qu’un bon gros coup de pied dans le derrière, et, accessoirement, mépris et ignorance? Il y a des imbéciles partout, quelque soient leur religion ou leur milieu socioprofessionnel. Toi, par exemple, mon bon Brice, tu es un teubé, mais tu n’en es pas moins Ministre.

Le problème de la burqa, et du voile islamique par extension, n’est pas qu’un problème européen. Voici une petite bande-annonce égyptienne, le visionnage intégral du film pourrait certainement t’éclairer sur les problématiques que le tissu pose dans la société de ce grand pays, et dans celles de bien d’autres.

Pour beaucoup, l’extrémisme religieux n’est qu’un moyen d’exercer une pression quelconque sur un groupe de gens, pour de l’argent, pour du pouvoir. Pour les autres, c’est un refuge. Et l’on s’y réfugie lorsqu’on se sent menacé, abandonné, pointé du doigt, puisqu’il est le seul relais possible lorsque tous les autres (l’école, la culture, l’emploi) n’existent plus.

Plutôt que de continuer à vouloir légiférer compulsivement, pourquoi ne serait-il pas possible d’utiliser les lois déjà en vigueur sur l’ostentation des signes religieux, de les mettre en avant et de les coupler à beaucoup plus de pédagogie?

Tu n’as toujours pas intégré que taper depuis tellement de temps sur l’étrange en tous genres n’allait pas faire remonter ton doux et tolérant parti dans les sondages, ni lui faire gagner plus d’élections. Au contraire, les nauséabondes voix que toi et ton petit groupe de bolosses briguez sont issues de gens qui veulent de la droite extrême qui a la trique, pas qui bande mou. Du coup, à ce petit jeu-là, tu risques de perdre gros. Déjà qu’en plus tu passes pour un gros beauf, tu devrais au moins t’épargner d’être perçu comme un gros looser.

Donc, Brice, pour en revenir à ta question, car je m’éloigne du sujet mais c’est de ta faute parce que tu m’énerves, je pense que tu devrais lâcher l’affaire. D’autant que tu n’es pas très beau, donc tu ne peux pas blâmer les autres d’avoir plus de chance lorsqu’il s’agit de pécho.

Dans la limite des stocks disponibles

17 janvier 2010

Cela fait presque trois mois que je n’ai pas écrit sur ce blog inutile. J’ai l’impression de recoucher avec un ancien ex qui ne s’est pas vraiment lavé.

Au début de la semaine, j’ai acheté le journal, et pendant quelques minutes, je n’ai pas pu décrocher mon regard de sa Une. Hébétée, une femme au visage couvert de poussière et aux cheveux tachés de sang, les yeux fixés vers le point de vue, le corps à moitié enseveli sous les amas d’un béton friable, ce même béton de piètre qualité qui compose la majorité des murs de l’ancienne colonie, dont la capitale Port-Au-Prince n’est plus qu’une ruine fumante.

Les jours suivants, j’ai été agacé par le sensationnalisme du suivi des évènements, de ce journal comme de tous les autres; il s’agissait de savoir lequel allait rapporter les témoignages les plus émouvants, les photos les plus insoutenables, les cartes et graphiques les plus sophistiqués. Aujourd’hui, je crois que cet agacement se transforme peu à peu en affliction. D’ici quelques jours, quelques semaines au plus tard, les feuillets quotidiens auront complètement oublié cette part moisie de la galette des rois putride qu’est le Tiers-Monde. On s’émeuvra du prurit de Xavier Darcos, probablement, et les haïtiens, comme depuis des années, ne possèderont toujours rien, si ce n’est que leurs yeux pour pleurer.

Il n’est pas inintéressant de découvrir l’Histoire de ce pays, ancienne usine esclavagiste à ciel ouvert, qui s’est émancipé à la fin du XIX° siècle pour tenter une démocratie à la Française. Mais comme souvent sous ces latitudes, comme souvent lorsque la France en a eu fini avec ses colonies en n’y manifestant plus qu’un intérêt économique, quand il lui est encore possible d’y pomper un peu plus d’argent, en Haïti se sont succédées les pires dictatures, dévastatrices, expliquant aujourd’hui l’étendue des dégats et des victimes, les infrastructures publiques étant aussi inexistantes là-bas qu’il n’y a de pluie au Sahel.

Drôle de vision que ce nouveau Paris, auparavant gêné par la neige, maintenant lavé par la pluie. En Hiver, les Parisiens sont souvent sombres, j’entends sombre par la manière dont ils s’habillent: grand trenchs noirs, longues robes en laine grise, il y a peu de place pour la fantaisie. Je le vérifie souvent quand je m’entretiens avec des non-français, d’Europe ou d’un peu plus loin, qui s’en font parfois la réflexion et qui s’extasient devant ma résistance colorée à la morosité vestimentaire.

http://www.juliendugue.com/images-wordpress/paris-neige-noir-et-blanc.jpg

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Cependant quand reviennent les beaux jours, quand Paris est irradiée de soleil et se transforme en un ersatz continental de Marseille ou d’Alger, il n’est pas forcément rare, au détour d’une petite rue étouffée par la chaleur, de croiser un quelconque quidam au t-shirt bariolé, ou une élégante pimbêche affublée d’une jupe chamarrée stimulant la persistance rétinienne. On dirait qu’en hiver les gens et Paris veulent faire la gueule en même temps.

Vendredi soir. L’entrée d’un club nouvellement à la mode depuis quelque temps. Une djette française auparavant spottée à Berlin et de retour en France depuis deux ans, y a élu résidence, l’explication rationnelle à la petite foule amassée sur le trottoir. On se pousse, on fume, on éructe, on boit, on gruge, on se faufile, de rares élus fendent le groupe et embrassent d’un air faussement mondain les physios avec qui ils échangent quelques mots d’un intérêt incertain. Pas sûr qu’ils savent eux-même de qui il s’agit, en attendant, les clubbers entrent au compte-goutte, la situation est très agaçante, il fait froid, une petite pouffiasse fait son cinéma en geignant et en sanglottant, pensant éventuellement émouvoir les tôliers qui n’en ont apparemment rien à carrer. J’aurais l’air d’un immonde réactionnaire en énonçant un douteux parallèle avec un pays comme, tiens, justement, Haïti, où l’on croirait qu’un staff humanitaire distribue quelques galettes de boue à un groupe de sinistrés faméliques mais que l’offre est excessivement restreinte.

Mais j’avoue que l’idée m’a traversé l’esprit, en m’éloignant vers le métro, en tentant de rouler une clope de mes doigts engourdis.

Prenez l’air, prenez l’Hermitage.

25 septembre 2009

Il y a des périodes d’en-dedans de la vie qu’il vaudrait mieux voir passer comme on regarde défiler les gens dans la queue du Pôle Emploi plutôt que de les subir de plein fouet.

Dernièrement m’est-il arrivé certaines déconvenues plus pénibles et fatigantes que graves, bien entendu, puisque personne n’est mort, personne n’a le SIDA, personne ne s’est encarté à l’UMP, mais bon, ceci dit, elles ont eu l’indélicatesse de me mettre les nerfs juste au-dessous de l’épiderme, et dès que je me frictionne, je suis dans tous mes états.
Je vous avais déjà narré l’incompétence chronique de ma conseillère bancaire, et bien dorénavant, je saurais que tous les emploi feu COTOREP sont concentrés au guichet d’icelle.

Je suis bipolaire. En fait, je crois savoir quelle en est la cause. La Bretagne. Mais pas seulement. L’Ukraine aussi. Et pour ne rien arranger, la Belgique m’assène un bon coup derrière la tête.
Vous imaginez? La Celtie, où les cornemuses sont le prolongement de l’âme celte et qui forcément a tendance à chialer, puis ajoutons à cela une petite touche slave, qui, c’est bien connu, est le peuple le plus déséquilibré de tous les peuples. Saupoudrons tout ceci d’un mélange wallono-flamand pour ce qui est de la dérision de soi. Vous obtenez ma famille.
Ceci dit, ça marche aussi avec l’alcool, puisque Bretagne+Belgique+Ukraine=aïe aïe aïe l’en-dedans de la boîte crânienne le matin au réveil.

C’est d’ailleurs assez étrange cette propension à vouloir rentrer chez soi quand tout va mal. Je veux dire, pas chez soi dans son logis sis rue de la Croquette, mais chez soi, là d’où on vient, là où on a grandi, où on s’est fait chier, où l’on a pris ses premières cuites, fait ses premiers touche-pipi, là où on a appris à conduire et fumer, bref, Brest.
Pas très loin de Brest en fait.
En définitive, le Finistère Nord.
Bon, c’est pas plus glorieux que d’avoir grandi dans la Nièvre, mais au moins ce département peut-il se targuer d’être au sein d’un espace culturel à forte identité. Celle-là va bien au-delà des panneaux de signalisation bilingues, je vous assure que si vous n’êtes pas breton, vous ne pouvez pas comprendre.

Ceci dit, je devrais plutôt sentir le camembert et la tarte Tatin, vu que j’ai été expulsé ex-vagina dans les alentours d’Evreux, chef-lieu morne et insipide de l’Eure, en Normandie.
Mais pour avoir passé environ 10 ans là-bas, tout au fond de la France, et pour porter un nom comme le mien, je considère plutôt que quand ça va mal, je rentrerais bien plus volontiers à Brest.
Brest me rend triste. Avant Nazi-Ricains-Panpan dans les années 40, Brest était plutôt pas mal, Saint-Malo du côté du port, Rennes dans les grandes rues, San Francisco sur les collines, Paris dans les faubourgs. Maintenant, elle a plus des allures de Nova Huta en Pologne, tarif réduit bien sûr. Après la reconstruction, on avait voulu donner à ses rues des numéros, comme à New York ou les grandes villes Américaines: 3° Rue, 7°Avenue. Ca aurait pu être drôle, mais on a conservé la toponymie d’antan, à base de rues de Siam et Jean-Jaurès, Halles Saint Louis et place de Strasbourg.
Il faut passer outre son aspect parfois peu ragoûtant, et on découvrira une petite ville un peu bordélique, qui sent un peu la bière mais qui vaut pas mal le coup. De toutes façons, c’est pas très différent qu’à Paris, tout le monde s’en plaint, mais personne ne pense vivre ailleurs.
Et puis pour ceux qui considèrent que PACA est la plus jolie région de France, venez traîner vos guêtres dans la rade de Brest, la baie de Douarnenez et les Abers du Nord-Finistère, vous comprendrez ce que le mot “chialer” signifie. Mieux que le Louvre, et avec l’air frais du large en plus.
Et puis, pour payer une binouse 1euro50 face à la mer, j’en connais plus d’un qui renierait ses parents.

J’ai des souvenirs doux et diffus de la Bretagne de quand j’étais petit, et qui ne se résume pas qu’à des bouseux en bottes pataugeant de le lisier ou des marins séniles en salopette Guy Cotten qui écoutent la météo en breton. Il y a beaucoup de crêpes, beaucoup de pluie, certes. Mais c’est comme penser qu’en Allemagne tout le monde est nazi et porte des culottes de peau. Du coup, Rennes et Cologne sont pratiquement à la même distance de Paris, disons que ça en décoincerait pas mal d’aller y faire un tour pour se vider de ce genre de clichés.
Alors oui, j’ai des souvenirs en forme de carte postale parfois, quand j’y repense, à la Bretagne. Mes parents avaient un van Nissan je crois, mais qui s’appelait une Vanette, que tout le monde nommait le “Fourgon”. Elle avait une odeur particulière à cause de ses vieux sièges élimés, et faisait un bruit animal lorsqu’elle s’élançait dans les ribines de Cornouaille, et joie de découvrir la mer en été, depuis les collines surplombant Crozon, aux champs à l’herbe sèche et le soleil irradiant.
Quand Papi était un peu moins vieux, il avait un petit bateau à voile et à moteur, l’Enez Vriad, un petit bateau blanc qui mouillait au Berly, un petit bras de la rivière d’Auray, au confins du golfe du Morbihan. On y descendait en voiture, on traversait un vivier par une microscopique digue de béton, on longeait la petite maison d’été de Lise Blanchet, de Thalassa, pour arriver au petit ponton de bois duquel parfois mon cousin Benjamin et moi-même allions plonger. On détachait le petit canot, on s’élançait sur l’eau sombre de la rivière pour arriver à l’Enez Vriad. Je me rappelle passer sous le pont de Gustave Eiffel, vieux Meccano noirâtre dominant le mignonnet port du Bono, et puis passer devant Saint Goustan, un autre port, celui d’Auray. On saluait d’un geste alerte les autres bateaux qui nous croisaient, un peu plus grands et un peu prétentieux, mais nous étions parfaitement bien sur le petit pont du nôtre, en pêchant parfois avec une ligne enroulée autour d’un boudin de liège, pêche qui s’avérait souvent (tout le temps) peu fructueuse mais qui nous ravissait, avec mon frère et ma soeur.
J’ai d’ailleurs un souvenir très clair, pourtant très lointain et qui remonte à quand je devais avoir cinq ou six ans, où lors d’une de nos occurrences sur le Golfe avec l’Enez Vriad, nous avions accosté sur une petite île, et découvert, dans la forêt qui longeait la plage, un hameau abandonné, en ruines, persuadés que l’île était complètement déserte et nous croyant de véritables aventuriers des temps anciens. Il s’est avéré plus tard que l’île devait être celles des Moines ou celle d’Arz, peu importe laquelle d’ailleurs.

Je crois que je suis plutôt fier et heureux d’avoir été enfant en Bretagne et d’avoir pu aller cueillir des noisettes en vélo, fait des cabanes dans le maïs du champ d’à côté, crapahuté dans les rochers de Brignogan, mangé des crêpes au sucre dans divers festivals où cornemuses et coiffes étaient de mise, appris le breton dans un collège privé un peu merdique, participé même à des concours de langue bretonne, aimé la pluie, marché dans les Monts d’Arrée et avoir été terrorisé par le sinistre Ankou. De toutes façons chaque enfant se construit là où il a été élevé, et maintenant je ne pourrais pas quitter Paris pour retourner vivre à Brest et ses alentours parce qu’il me faut ma dose de dioxyde de carbone, de merdes de chiens, de métros bondés et de vie sociale insupportable, mais voilà, quand ça va mal, ça fait du bien d’y repenser.
Et puis j’imagine qu’à New York quelqu’un pense avec tendresse au Rhode Island de son enfance, ou qu’il manque Shikoku à un tokyoïte.

Ca me fait penser que la Bretagne est la région française où la population d’origine étrangère y est moindre. Ce qui est plutôt pas mal, puisque c’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes.

Et puis à Calais, on détruit tout devant les chaînes de télévision. Un joli coup de pub. Et apparemment délicat, puisqu’Eric est un homme cool qui traite les gens bien. Des gens qui ont eu une vie de merde jusqu’à la Mer du Nord, et qui tiennent le coup en caressant l’espoir de traverser le Channel pour pouvoir recommencer quelque chose d’un peu mieux chez les Rosbifs. Parce qu’en France, on traite les clandestins comme des criminels qui risquent de violer nos enfants et de nous voler notre carte de fidélité de chez Champion.
Qu’espérait-il, Eric, après s’être demandé s’il ne valait mieux pas ne pas appliquer la loi sur les tests ADN: prouver qu’il est de toutes façons un homme de poigne en prenant le problème de la Jungle de Calais parce que, vous comprenez, la situation est intenable pour tous ces pauvres gens? Mais Eric ne trompe personne.

Après la sortie du gros Brice suintant, il fallait adoucir le trait, d’où non-application de ces tests de merde. Et puis rassurer l’ouverture en tapant du pied dans la jungle comme on écrase une fourmilière.

Bien sûr que c’est inacceptable de voir traîner des gens leur misère dans les rues d’une ville, bien sûr que c’est inacceptable de les laisser dormir sous des tentes en carton et risquer de crever à chaque fois qu’ils se cachent dans un camion pour passer en Angleterre, bien sûr que c’est compréhensible que des calaisiens en aient un peu leur claque et incompréhensible que d’autres risquent la tôle pour avoir rechargé des téléphones portables ou avoir amené un peu de bouffe à ces pauvres gars, mais c’est tout simplement qu’on les considère comme un problème plutôt qu’une chance.

La France sent le moisi, et de plus en plus.
Et moi j’aimerais aller à Tours boire du vin blanc et fumer des gros joints pour oublier tout ça.

Prière de tenir la main courante.

11 septembre 2009

De doux souvenirs me serrent la gorge à l’heure où j’écris ces lignes et que vous lirez certainement d’un œil désintéressé.

Votre cher ami, fournisseur officiel de billets d’humeur relativement diffus, a fait quelques années d’études. Il est à noter qu’avec le recul son caractère masochiste est absolument certain, puisqu’ayant détesté l’école pendant dix-huit longues et douloureuses années il s’en est infligé trois de plus dans divers lieux géographiques.

Après le bac, Guilvic s’est donc rendu à Rennes, capitale de la Bretagne, disposant de l’une des Universités les plus réputées de France, à l’époque où les Universités étaient encore réputées. Villejean, écrin d’architecture cramoisie, de campus à l’herbe rase et brune, entouré de l’un de ces nouveaux quartiers rennais qui ont profondément défiguré la ville au cours des trente dernières années, la découverte émouvante d’un monde jusqu’alors ignoré de moi, mélange de petites meuffes en sarouel à vélo, de grands hippies hirsutes jonglant et déclamant des poèmes au beau milieu de petits groupes d’étudiants-enfants ne réalisant pas qu’ils ont quitté le lycée, des amphis bondés lors de la pré-rentrée, déserts à mesure que l’année avance, des agents administratifs dépassés, des Erasmus sexy en diable, de l’alcool sous les colombages de la place Sainte Anne, et les grands instants d’émulation politico-tarfouffe: les manifs.

Le climat politique de cette douce période était pour le moins assez perturbé. Tout juste commencions-nous à découvrir la vie sous l’ultra-droite, autant vous dire que pour une personne délicieusement bercée toute son enfance dans de subtils idéaux gauchistes, l’ambiance était assez particulière. Puis, émanant des arcanes rances et impénétrables des administrations, l’on décida de réformer en profondeur les diplômes, à une échelle européenne. Ce qui ne plut pas. Ce qui provoqua un émouvant mouvement unitaire, dans lequel je fus plongé et tentai de surnager.

C’est une étrange expérience que d’entrer la première fois dans un amphi pour la première des A.G qui décidera de la forme du mouvement. En général, elle ne décide de rien du tout, si ce n’est de confirmer que tout le monde est d’accord pour se mettre en grève. Je ne veux pas jouer le jeu fétide d’une certaine mouvance idéologique, car en général, ces réunions sont assez riches en débats et en rebondissements. D’un cliché d’une jeunesse révoltée pour rien, pour tout ou tout du moins pour pas grand chose, on découvre certains éléments très intéressants, à l’argumentation solide, autant que leur connaissance des enjeux en question et des rouages des politiques, nationales ou plus globales. La richesse des échanges qui y ont lieu sont tout à fait exaltants, scandés dans un vieux micro qui crachote, et la Résistance s’organise, à base de mains levées et de bulletins affichés dans les moindres recoins des bâtiments.

Au fil des jours, ceux-ci sont investis pour la moindre raison. Dans les couloirs, des ateliers sont organisés, on peint des pancartes étrangement ressemblantes à certaines icônes d’un certain événement pré-seventies, chaque amphi se voit muté en « comité »: comité d’action, comité de relations presse, comité d’encadrement… Lorsqu’il arrive qu’un cours soit maintenu, il n’est pas rare que celui-ci se voit entrecoupé d’interventions diverses, de l’annonce de la manifestation de l’après-midi à la pure agitation informelle pas vraiment opportune. Un village associatif prend ses quartiers dans un coin inusité du campus, les bâtiments sont occupés la nuit, on fume dedans, dehors, des punks à chien investissent les réunions, des anars sur le retour prennent part aux débats, souvent pour le pire.

Et puis un flottement s’empare du corps de votre aimable interlocuteur. Ayant toujours été d’une nature désinvolte, mâtiné d’une oisiveté presque maladive, il était tout à fait prévisible que je sombre. Est-ce par lâcheté que je décidai de ne pas m’impliquer du tout dans ce qu’il se passait autour de moi, préférant regarder des DVD dans ma modeste chambrette jouxtant le périphérique du côté de Kennedy, écouter les Smashing Pumpkins dans la cité U post-soviétique Anjou avec une rousse d’affection et aller boire des coups à la terrasse du Tchick en sa compagnie, fuyant mon UED de Géographie et mon option Allemand version? Je ne crois pas. Par paresse, sans doute, et pour le coup, je ne renie pas cette douce année septentrionale, j’y jette parfois un regard mélancolique, et je pleure, en silence, en me caressant doucement l’avant-bras. Nan, je déconne.

Je vais essayer de conclure comme je peux. Il faut cesser d’avoir peur, cesser d’être mièvre et oser affirmer haut et fort: oui, il faut croire à la réhabilitation du croc de boucher. Si j’étais délégué au comité du croc de boucher, le premier à en faire les frais serait sans aucun doute Brice Hortefeux. Vous connaissez sans doute mon aversion pour cette fricadelle ambulante, et une petite recherche sur internet te permettra aisément de comprendre pourquoi je préconise le châtiment suprême pour ce misérable personnage.

Si je le prenais sans humour, sans doute que je me flinguerais. Ou que j’émigrerais en Belgique. Ou en Lituanie. Pour vivre en-dedans de la France ces jours-ci, il faut une bonne dose de distanciation. Ou de Lexomil. Pas étonnant qu’on soit le premier pays au monde à se shooter quotidiennement.

Éventuellement une bonne corde. Mais je vais attendre les soldes de janvier chez Leroy-Merlin, parce que faut pas déconner.

Sinon j’ai offert une place de cinéma à Jean Douchet. Et ouais, je peux moi aussi me la doser, parfois.

Conditions générales de vente.

30 août 2009

J’aime le fonctionnement du cerveau humain. Et comme de manière générale il fonctionne d’une manière binaire, par association d’idées.

Votre dévoué a en sa possession un cerveau, assez amoindri il est vrai, au point de faire vivre à son entourage des situations parfois insupportables. J’admire d’ailleurs leur esprit de tolérance, le seuil a failli être franchi cette semaine à cause de certains évènements excessivement dérangeants. Ou alors l’a-t-il été et je ne suis pas - encore - au courant.

Achevons cet apparté et revenons à ce qui constitue l’objet de cet article. Cette semaine, une image télévisée assez pénible à regarder, un homme témoigne, sa voix est doublée, il dit qu’il n’en peut plus, qu’il craint pour sa vie, on ne voit nullement sa tête mais son buste bronzé, recouvert d’un bandage, je pense immédiatement à l’Iraq, au Honduras, intérieurement je me désole de l’état du Monde, et puis le mot “homosexuel” est prononcé, je reformule mes intérieures pensées en me disant qu’il n’est pas doux d’être pédé dans des pays en guerre, dans certains pays tout court.

J’apprends un court instant plus tard que le pays en question est séparé du mien par une chaîne montagneuse commune, et que c’est dans sa capitale que cet homme a été agressé. Poignardé, plus précisément, avec son ami qu’il embrassait, sur la bouche, dans la rue.

Je n’ai pas vraiment de sympathie pour Giovanni Alemanno, l’hypocrisie des fascistes repentis à tendance à me faire quicher, mais néanmoins a-t-il l’air de vouloir améliorer la condition de ses admnistrés d’en-dedans de la jaquette. Ce qui, cependant, est la moindre des choses. Et évitons le mauvais esprit en le soupçonnant de démagogie après cette agression certes assez impressionante, parce que c’est toujours mieux que rien. Faudrait-il encore que l’Italie adopte une loi concrète contre les actes manifestes d’homophobie. Mais dans un Etat où l’on emprisonne les immigrés qui échouent sur ses plages tristes après avoir vécu l’enfer, parce qu’il considère que c’est un délit, je ne rêve pas forcément à de meilleurs lendemains.

Qu’il est drôle de découvrir par ailleurs que l’immonde assaillant, un “vrai fasciste, qui hait les pédés”, se fait surnommer “Svastichella”, la “petite svastika”, ce qui laisse augurer de ses faits d’armes en tant que “vrai fasciste”. “Qui hait les pédés”, de surcroît. Pauvre Svastichella. Quel a donc pu être son traumatisme, combien douloureuses ses frustrations pour en arriver à fracasser des bouteilles en verre sur deux pauvres macaronis qui se bécotaient en toute mignonnade? Svastichella, mon bon, ne devrait-on pas plutôt t’intituler “Cazotello” que tu es tellement énervé que les pédés de ton pays arrivent mieux, et surtout plus, à chopper que toi? Es-tu tellement malheureux de devoir imposer aux gens une image de toi virile, belliqueuse, qui sent la sueur, la bière et le sang, alors qu’au fond de toi tu rêves d’un grand noir qui t’étreigne, t’emmène en Croatie et te prépare des lasagnes au saumon en écoutant Rufus Wrainwright, et que pour attiédir cette privation tu aies décidé d’aller planter des pédés? Svastichella me rend triste. Mais je crois que nos deux amis s’en sont bien tirés, tout du moins leur vie n’est pas en suspens, alors le sort de ce gros connard m’importe finalement autant qu’un bon d’achat chez Monsieur Bricolage.

Sinon, chez Agora, je ne trouve plus le magazine Le Tigre, et ça, c’est pas chouette.
En parlant de ça, j’ai appris que Christina Aguilera avait collaboré avec Le Tigre, le groupe riot, mais également avec Santigold ou Ladytron. Weird.

Sur la base du volontariat.

20 août 2009

J’aimerais ne pas avoir à aller faire mes courses dans les supermarchés. Bien au-delà du fait que ces endroits me posent des problèmes d’ordre éthique ou socio-économique.

Quand j’étais un peu plus jeune et que j’habitais encore chez les douces personnes ayant contribué à mon arrivée dans ce monde sordide et déliquescent, il nous arrivait parfois de nous rendre en vacances dans le nord de la France, au Havre ou à Lille, et j’aurais sans doute l’occasion de te parler plus amplement de ces deux villes, - je te dis tu car tu es probablement le seul à te rendre quasi-quotidiennement sur ce blog, ce qui déjà pas mal mais, tu en conviendras, largement insuffisant – , en passant obligatoirement par les confins de la Basse-Normandie. Ce devint bientôt une tradition, elle avait pour décor cette ville neutre d’Avranches, nous nous arrêtions systématiquement dans un supermarché sis dans une zone commerciale médiocre. Cette tradition répondait à des nécessités d’ordre physiologique et hygiénique, correspondant à l’heure de manger, faire pipi, racheter des bonbons pour le voyage jusqu’au prochain arrêt. Ce supermarché un peu désuet entouré d’une galerie marchande pathétique était de taille réellement moyenne, voire complètement petite. Elle était toujours pratiquement vide, des gens en survêtement la parcouraient le regard vide, s’arrêtant mollement au magasin de gadgets ou bien à l’animalerie pour observer les oiseaux exotiques. Je suivais mes parents se ravitailler d’un pas plutôt alerte, mais au fond d’en-dedans de moi-même, je ressentais une insondable mélancolie. Elle disparaissait lorsqu’enfin remontés dans la Renault Espace bleue, nous abandonnions cet endroit nimbé d’une aura mystique, comme un endroit perdu dans le temps et l’espace, où il ne fallait pas rester plus d’un quart d’heure de peur d’y être emprisonné à jamais.

Bizarrement, le Simply Market de la place Léon Blum m’est complètement indifférent. J’aime à penser qu’avec un peu plus d’argent j’irais faire mes commissions au primeurs et au poissonnier du haut de la Roquette.

L’occasion m’est ainsi donnée de vous parler de Jean-Luc Châtel, bienheureux nouveau Ministre de l’Education, au visage parfaitement stupide. Lundi matin s’était-il rendu à l’Intermarché de Villeneuve-Le-Roi pour partir à la rencontre de délicieuses mamans faisant leurs courses de rentrée, dans le but de promouvoir la baisse des prix sur ces articles nécessaires mais certes parfois onéreux. Que n’a-t-il pas été surpris de voir le rayon des fournitures scolaires étonnamment bondé. De sémillantes dondons virevoltaient de part et d’autres des étalages et, mûes par un désir presque sexuel de témoigner de la bienveillance de leur Ministre quant à leur pénible tâche, avaient accroché à leur visage poudré médiocrement un sourire éminemment insupportable, et très étrangement enthousiastes à l’opération « les essentiels de la Rentrée » que Luc était censé promouvoir. Elles étaient finalement reparties, certaines parfois dans le même véhicule, après le départ du Ministre, laissant leur caddie en plan, dans le supermarché désert d’un lundi matin d’Août francilien.

La France est gérée telle une multinationale avec ses plans marketing, celui-ci n’en était qu’un de plus, malgré les vagues tentatives de Luc de se dédouaner sur France 3 et à la radio, même si Intermarché a fait savoir par le biais de sa direction que ces gentilles connasses avaient été gentiment priées de venir faire de la figuration. J’ai dans mon esprit l’atroce souvenir des images de Luc, à la tête de chien nauséeux, et de ces insipides naïades boudinées en habits bon marché, complaisantes, qu’il m’ait été donné le pouvoir d’avoir pu être sur place et je les aurais bien lattées à grands coups de compas et de double-décimètres Maped.

Malgré les insupportables rumeurs abjectes qui courent sur mon compte en ce moment, je suis bel et bien homosexuel. Mon orientation sexuelle ne concernant que moi, et, éventuellement mes amis proches avides d’anecdotes croquignolesques, je ne suis pas ce qu’on pourrait considérer comme une personne très active dans le  « milieu », la « scène » gay. D’ailleurs ma dernière occurrence dans un bar gay m’a presque carrément donné envie de mourir, mais, soit, je suis un garçon tolérant, et même si je ne m’y reconnais pas, un pays avec une scène gay active est normalement un pays plutôt libéral en ce qui concerne l’acceptation des divers modes de vie. En ce qui concerne le mariage et l’adoption pour les gens de mon espèce, je me contrefous de l’un comme de l’autre, détestant l’engagement autant que les mouflets, même s’il me semble que dans un pays comme la France, ces questions auraient dues êtres réglées depuis un bon moment déjà. Regardez en Espagne, tout le monde s’imagine que là-bas ils se promènent tous avec un jambon sec sous le bras et brandissant un crucifix, n’empêche que les pédés reçoivent un peu plus de considération. Vous vous en foutez? Je sais, vous ne m’avez rien demandé, mais je vous le dis, c’est tout.

Ce qui est plutôt intéressant, c’est d’observer comment une chaîne de télévision connue pour son goût raffiné et la qualité de ses émissions se sert de l’homosexualité comme élément de divertissement.

On se rappelle de « Queer », cette fantabuleuse émission de relooking où un pauvre idiot ou une pauvre cruche moche, ringarde et mal fringuée était coachée par quatre fringants homosexuels parisiens, qui, c’est bien connu, en savent un max en matière de jolis vêtements, musique sympa, déco affriolante, bouffe goûtue. Cette émission nous venaient d’en-dedans des USA, et, soit dit en passant, « Queer » fait office de programme culturel face à d’autres reality-shows beaucoup plus fétides. Bref, déjà à l’époque, après m’être confronté une ou deux fois à ce spectacle pour le moins affligeant, j’avais confirmé en-dedans de ma tête à qui ce genre d’émission pouvait bien s’adresser. « Regarde-les, ces pédés, ils ont beau sucer des bites et s’en prendre plein le cul, ils lui ont changé sa vie à cette pauvre conne, elle avait les cheveux gras, collectionnait les t-shirt Titi et Grosminet, ben n’empêche que maintenant, elle a l’air vachement plus épanouie dans son salon Ikéa ».

Cet été, c’est au tour de mon Incroyable Fiancé d’être pédé. Enfin de faire semblant. Enfin d’après ce que j’ai compris, le pauvre cul de service n’est pas tout à fait au courant du principe de l’émission, pense qu’ils sont deux candidats, ils doivent faire croire à leurs parents respectifs qu’ils sont ensemble, mais en fait c’est bidon parce qu’ils peuvent gagner beaucoup d’euros, mais en fait l’un tombe réellement amoureux de l’autre, mais en fait c’est pas vrai car il est complice de la production, etc… J’ai cru comprendre que lors d’un repas, les parents du « vrai » candidat avaient l’air assez atterrés de réaliser que leur con de fils avait trouvé l’amour poilu et burné, ils en faisaient des caisses, le drame devait être assez horrible pour qu’il pète un peu plus les plombs.

En fait, le problème n’est pas d’utiliser l’homosexualité comme ressort divertissant, ou comique, d’une émission estivale destiné à un public plutôt jeune et un peu con. Ce qui est plutôt triste, c’est que ces émissions ne sont que la traduction du très bas de plafond « Moi les pédés, je m’en fous, mais qu’ils me laissent tranquille ». Voilà. Une version télévisée de cette phrase un peu beauf.

Je crois qu’il pleut. Et j’aime assez la pluie en été. Ca me rappelle Toulouse.

Sinon, en ce moment, au Nouveau Latina, on passe « Mariage à l’Italienne ». Venez, c’est frais, c’est drôle, et si vous me connaissez je pourrais éventuellement vous faire de doux baiser d’amour, car il est doux d’aimer.

Ils ne mourraient pas tous, mais tous étaient frappés.

16 août 2009

Je sais, je ne me suis pas foulé.

Dites-donc, j’ai pas que ça à foutre de faire un blog pour la gloire et votre amusement personnel si c’est pour que personne laisse des commentaires, alors je vous prierais de bien vouloir, au choix, m’insulter, m’aduler, me modérer.

Les doux souvenirs d’en-dedans de mon enfance me serrent la gorgent et emplissent ma poitrine d’un poids mélancolique soudain. Et justement, en-dedans de mon enfance, lorsque j’habitais dans un espace géographique assez flou sentant le camembert et les raffineries en fin de vie (cf Haute Normandie), dans un quartier inutile d’un village pénible, il y avait deux types, Samuel et Grégory, qui étaient grands et effrayants; en fait, pas si grands ni effrayants, mais ils devaient avoir 13 ans alors que je n’en avais que sept. Toujours est-il qu’ils faisaient leur loi dans ce quartier, et qu’on avait souvent maille à partir avec eux.

NB: Cette expression existe bel et bien, il suffit juste que vous sortiez un peu votre nez de vos écrans divers et variés et que vous lisiez des livres, voire même consultiez un dictionnaire une fois de temps en temps pour enrichir votre vocabulaire de pauvre enfant du futur misérable et décérébré.

Un jour de désœuvrement comme il en arrive beaucoup dans ces endroits déshérités de la France, ils avaient emmerdé ma sœur qui avait dû monter dans un arbre pour leur échapper, et en descendant, elle s’était foulé la cheville. Je me rappelle aussi qu’une fois, étant alors un enfant assez problématique, je les avais menacé avec un couteau alors qu’ils étaient venus me narguer tout autour de la maison de mes parents. Par la suite, ils m’avaient accusé de les avoir blessés alors qu’aucunement la lame n’eût jamais touché une quelconque surface de la peau de ces petits vomis humains. Je crois savoir que ça m’avait causé pas mal de problèmes. Mais c’est tout ce dont je me souviens, vous savez, c’était il y a très longtemps et on a, je crois, peu de restes de notre petite-enfance.

Si je vous parle de Samuel et Grégory, c’est parce qu’ils sont cet élément si commun à tous les quartiers d’en-dedans de la France, voire du monde, à savoir deux petits emmerdeurs d’une famille Groseille indistincte, au même titre que la famille de bourges un peu coincés au nom breton compliqué, la famille de la femme divorcée un peu salope et le couple de retraités qui sent un peu la pisse mais qui offre des confitures délicieuses les jours venus et qui vous demande toujours des nouvelles de votre petite bru que vous n’avez pas.
En général, ce couple de derniers possède un immonde petit roquet, laid et flétri, qui passe ses journées couché sur le carrelage froid et de mauvais goût du salon, et qui, quand l’envie lui en prend, sort devant le garage pour aboyer à tout va, sur tout le monde ou sur personne, à la fourbe, de loin, persuadé d’être indispensable et que tout le monde lui porte attention alors qu’en définitive, ses glapissements pénibles ne forment qu’un fond sonore diffus, énervant certes, mais insignifiant.

Réfléchissez! Essayez de vous souvenir. Si vous n’avez pas vécu dans ce quartier, votre mamie, vous cousins, ou cette vieille tante que vous visitiez trois fois tous les cinq ans y a habité. Vous avez donc croisé un Samuel, un Grégory, et ce couple de vieux avec leur chien insupportable.

Avec un peu d’imagination, vous vous rendrez compte qu’on peut facilement extrapoler, et désigner la France comme ce quartier tranquille et ennuyeux, et que ce roquet turpide est

Ne pas jeter sur la voie publique.

8 août 2009

J’ai des visions de Tskhinvali, la capitale de l’Ossétie du Sud. En géorgien, ça veut dire “la cité des charmes”. L’arbre, pas ce qui caractérise le charisme.

J’aimerais beaucoup illustrer cet article avec une jolie photographie de la ville, qui engloberait de jeunes filles ossètes marchant d’un air désinvolte dans une petite rue bordée des susnommés bétulacées, projetant de petites ombres désordonnées sur des façades bleues et roses, percées de fenêtres au bord desquelles sècheraient des fruits des vergers environnant la ville.

Mais quand je tape “Tskhinvali” dans Google images, hormis quelques clichés un peu dépassés datant des années 70, tout ce que je réussis à obtenir renvoie aux pires images de la guerre des Balkans, à base de chars renversés et de corps aux chairs rosies par le feu.

Tskhinvali est un tampon entre Russie et Géorgie, qui ont l’air de s’ennuyer beaucoup et qui aimeraient ressortir leur gros engins pour s’amuser un peu, un an après une guerre éclair qui n’a fait que creuser un peu plus une plaie qui suppure, comme celles qui parsèment certains endroits de notre si jolie planète.

Depuis ma cabine, je préfère regarder les homosexuels qui s’effleurent ou s’embrassent, remontent leurs lunettes de soleil Gucci sur leur nez bronzé, agitent leurs téléphones très compliqués au-dessus de leur tête lorsqu’ils croisent un visage connu. Des vieilles aux cheveux colorés dans des tons automnaux et aux robes légères à pois déambulent sans but précis parmi les couples bien habillés qui poussent des landau très ergonomiques, deux ou trois pouffes éructent des mots indistinct par-ci par-là en se dandinant. Sur l’affiche de “The Children’s Hour”, l’expression figée de Shirley Temple a un côté bizarrement apaisant, ce qui est assez paradoxal lorsqu’on connaît le film.

Je me fais vraiment chier.

Sinon, ma carte a été bloquée. Tout à l’heure, en voulant acheter des tickets de métro, elle ne passait pas, je pensait qu’elle déconnait, j’ai voulu tabasser l’agent RATP qui m’envoyait de petits coups d’œil pénibles, et puis j’ai bien dû me rendre à l’évidence. Cette salope de Mme M. du Crédit Coopératif a fait bloquer ma CB. Le Crédit Coopératif. Ca sonne bien. Ca serait un peu comme le Naturalia des banques, une banque Max Havelaar, une banque avec des dreads, qui fume des joints et joue du djembé. Seulement, le Crédit Coopératif est la banque des associations en cessation de paiement, aux types dont le compte est sous tutelle ou aux clodos qui peuvent quand même retirer de l’argent. Habituellement, je ne contacte jamais Mme M. , elle me fout la paix malgré mes découverts à la profondeur abyssale. Ce mois-ci, il avait commencé à entamer la croûte terrestre. Elle a dû mal baiser cette semaine et pour se venger, m’a bloqué ma carte. Je vais devoir l’appeler Lundi. Je la déteste. Elle me fait peur. J’aimerais pouvoir lui dire qu’elle est un peu gonflée quand on sait que la situation de mon compte lui a payé ses vacances au Lavandou cette année. Inventer des excuses bidons, lui dire que je travaille plus pour gagner plus, que j’ai gagné à un jeu débile sur RFM ou que je vais retrouver mes APL à la rentrée. Mais j’ai la désagréable phobie des banques. Je m’imagine qu’elles dirigent le monde et ont le droit de vie ou de mort sur de pauvres petits pédés comme moi. Alors du coup, je vais fermer ma gueule, lui lécher ses fesses flasques et nauséabondes, et peut-être qu’elle voudrait bien la débloquer, cette fucking carte, et que même ça la fera un peu mouiller après tout, et qu’elle aura pas perdu sa journée de merde.

Je suis pas sûr cependant que ma phobie des banques soit réellement infondée.